Hier, ma journée a commencé avec du piment, elle s’est terminée avec du chocolat…
2 pères – 2 filles – 2 histoires (aux noms fictifs)
Lui, Serge, 3 mariages, 2 nationalités, une carrière pro fulgurante, un vrai baroudeur…
AVC 84 ans – fin février
il sifflote dans les couloirs, demande 15 fois par heure ce qu’il fait là et pourquoi? Cherche son commercial pour aller sur le chantier où on l’attend…
Et un mail qui tombe à 9h21, avec des mots, comme un uppercut au plexus :
« Aujourd’hui, j’ai rendu visite à mon père et il ne m’a pas reconnu, j’étais complètement effacé de sa mémoire, autant vous dire que c’était très difficile…(…) Je vous informe aussi qu’il n’est pas question que nous acceptions une place dans une structure (éloignée) je trouve que c’est plutôt maladroit de votre part de ne pas tenir compte de ça (…) La situation est apparemment compliqué pour tout le monde mais je pense tout de même qu’elle est plus difficile à vivre pour mon père et moi que pour les équipes (…) Merci de prendre en considération mes difficultés et non pas uniquement celles de vos équipes soignantes. »
C’est sa fille. Elle ne comprend pas, elle a mal. Elle m’en veut. Elle nous en veut.
Lui, Yves, très impliqué dans sa commune, aime rire, 1 épouse, 3 enfants, éloignés.
AVC 79 ans – décembre dernier
Il arrive en hospit’, parle difficilement, ne marche plus sans aide, fait difficilement sa douche seul. On évoque au mieux un déménagement de leur grande maison à étage, au pire un EHPAD. Il est rentré chez lui. Hier. Aucune aide. 3 mois d’hospitalisation et une progression incroyable.
Et ce mail. De 17h59 :
« Encore merci pour ce dernier mail très clair et qui nous facilite la suite. Quitter le centre (…) n’a pas été sans émotion….
Je persiste à dire que certes, vous faites votre travail mais avec une belle énergie et un immense investissement.Mille MERCIS et que le chocolat morlaisien vous donne force et courage! »
C’est sa fille. Tellement reconnaissante, tellement bienveillante. Si encourageant.
Mon en miettes, dans les 2 cas – Ma journée d’hier a été un véritable ascenseur émotionnel
Après 20 ans de métier, ça marche encore. Et heureusement!
C’est ça notre job, c’est s’adapter à ces histoires de vie pleines de résonance parfois. Des vécus fragiles. Si semblables et si différents.
Et traverser en une journée la colère, l’acceptation, l’injustice, la reconnaissance, la solidarité, les joies et les peines….et déguster des chocolats morlaisiens sur son canapé à 23h43 en se disant que demain sera un autre jour….